APRES LA VISITE DE NICOLAS SARKOZY A CHANGE, le 20/10/11.
En voyage électoral en Mayenne pour le 4ème anniversaire du Grenelle de l’environnement, Nicolas Sarkozy s’est encore une fois servi de la popularité des énergies renouvelables pour faire la promotion du nucléaire. C’est une nouvelle provocation pour un département qui s’est mobilisé contre l’enfouissement des déchets radioactifs et qui s’emploie ardemment à développer les Energies Renouvelables et les Economies d’Energie.
Expliquer inlassablement que l’énergie nucléaire est la plus propre et la moins chère et que les allemands ont fait le mauvais choix en programmant la sortie du nucléaire, est un discours qui n’est plus recevable en dehors de nos frontières surtout depuis la catastrophe de Fukushima. (La Belgique vient à son tour de programmer la sortie du nucléaire après l’Allemagne, la Suisse, l’Espagne etc…)
Il convient de rétablir quelques vérités :
- Tout d’abord, tordre le cou à cette affirmation que l’Allemagne est bien heureuse de trouver la France pour la dépanner en électricité !
C’est le contraire, la France achète beaucoup plus d’électricité à l’Allemagne qu’elle ne lui en vend. Différences de 8.7 TWh en 2004, 9.6 TWh en 2005, 5.6 TWh en 2006, 8.2 TWh en 2007, 12.6 TWh en 2008, 11.9 TWh en 2009, 6.7 TWh en 2010. (Source Bilans annuels RTE).
RTE s’inquiète même pour l’hiver qui arrive, car la France, où le chauffage électrique est développé massivement, atteint des consommations record lors des pics en début de soirées à températures négatives. Dans ces situations, même en faisant fonctionner toutes nos centrales thermiques à flamme, nous importons une quantité importante d’électricité généralement d’Allemagne pour satisfaire la demande.
– Il faut aussi rappeler que l’Allemagne a respecté son engagement européen en matière d’énergie renouvelable électrique en 2010, alors que la France qui devait atteindre la part de 21%, n’est parvenue qu’à 15.4%, c'est-à-dire le même pourcentage qu’en 1990 !
Plutôt que de prétendre qu’elle est la meilleure au monde, la France aurait intérêt à analyser la stratégie allemande ou la programmation de sortie du nucléaire a donné un véritable élan à toute la société en matière ; de développement de la recherche, de la production et de l’exportation des technologies renouvelables : résultat lisible dans la création de nombreux emplois et dans l’excédent de son commerce extérieur.
– Sur le coût du kWh électrique, il faut être sérieux et ne comparer que ce qui est comparable. Nos centrales nucléaires ont bénéficié de fonds publics comme aucune autre énergie et arrivent pour certaines en fin de vie. Le coût du kWh nucléaire français n’inclut pas les coûts d’assurances (aucune assurance au monde ne veut couvrir le risque), les coûts de démantèlement des centrales et les coûts de gestion des déchets. L’ensemble de ces coûts non répercutés à la consommation constitue une énorme dette que nous transmettrons à nos enfants.
Comme le rappelait Joseph Stiglitz (Prix Nobel d’économie et ancien patron de la Banque mondiale) : « Le nucléaire vit surtout grâce aux subventions publiques ce qui est totalement anti économique ».
Mikhaïl Gorbatchev (Prix Nobel de la Paix en 1990), ne dit pas autre chose en déclarant lors du triste anniversaire de Tchernobyl, le 26 Avril dernier :
«La rentabilité du nucléaire est très exagérée et son coût ne prend pas en compte de nombreuses charges cachées » et de citer « l’exemple des 260 milliards de dollars alloués à l’énergie nucléaire aux Etats-Unis, alors que dans le même temps les subventions apportées aux énergies éoliennes et solaires ne représentaient que 5.5 milliards de dollars ».
Avant de conclure : « La voie nucléaire est une voie sans issue, le monde doit rapidement passer à des énergies efficaces, sûres, et renouvelables, lesquelles apporteront d’énormes bénéfices économiques, sociaux et environnementaux, en préservant la fragilité de notre planète ».
Enfin, dans de nombreux pays d’Europe, d’Amérique ou d’Asie, des études de coûts de production concluent que le coût de production du kWh nucléaire est aujourd’hui au moins aussi élevé que celui du kWh éolien (80euros le MWh). Par contre à l’avenir l’avantage passera inéluctablement à l’éolien tant la sécurisation du nucléaire augmentera ses coûts.
En conclusion : La sortie du nucléaire ne peut se faire évidemment du jour au lendemain. Elle doit être réfléchie, progressive, à la mesure du développement des économies d’énergie, de l’amélioration de l’efficacité énergétique , du développement et de la complémentarité des énergies renouvelables. Mais il faut avoir dès maintenant une vision énergétique pour l’avenir et il n’y aurait rien de pire que de décider la relance d’un nouveau programme électronucléaire, décision qui nous engagerait pour 50 années et empêcherait la transition énergétique nécessaire.
Three Misle Island, Tchernobyl, Fukushima : plus personne ne conteste que l’accident irréparable est possible. La sagesse et la responsabilité nous imposent un changement de cap.
Il nous appartient de fermer progressivement les réacteurs les plus âgés et les plus risqués, comme nous le recommandent nos voisins européens. Il y aura un énorme travail de démantèlement et de gestion des déchets. Mais surtout arrêtons cette fuite en avant et stoppons la construction de tout nouveau réacteur en utilisant l’argent beaucoup plus efficacement en direction de la maîtrise de l’énergie et du développement des sources renouvelables.